Paris
Photo Paingout
De train en train,
De ville en ville
Campagnes, paysages, météos
J’ai envie de raconter une France qui n’est pas des cartes postales, un Paris qui pue et dans laquelle des SDFs se lavent avec l'eau de la Seine, des ciels gris et lourds, la couche de pollution qui absorbe l’énergie. J’ai envie de dessiner des trajets de train aux paysages beiges, maisons grises, kilomètres de voies ferrées qui quadrillent la France tissage de l’ère industrielle. J'ai envie de partager ce voyage à travers les yeux d'une française émigrée de passage au pays.
On me demande - qu’est ce qui te manque le plus la bas?
Là bas Québec Montréal mon amour
Immigration choisie.
Je réponds vite - si peu à réfléchir -
La nourriture
La facilité et la rapidité pour se déplacer, la proximité de tout
La variété de paysages sur un territoire aussi petit.
Ici —
Chaque bouchée explose dans ma bouche
Chaque kilomètre de train TGV Aix-Paris-3h, 2€50 pour se rendre à 1h de Paris, les autoroutes lisses
50 km pour changer de mer à montagne de plaine à collines de grande ville à village
Française, 26 ans sur le territoire et des racines plantées profondément dans l’histoire de ce pays, certain.e.s diraient « Française de souche », oui malgré mes arrières grand parents italiens qui immigrèrent pour devenir mineurs dans le Gard, malgré l’ancêtre Alsacien de père inconnu. Française, de grands mères parisiennes qui marquèrent leur passage dans les pierres de cette ville, jusqu’à mon père fuyant la capitale pour trouver une paix temporaire en Provence. Française émigrée sur le nouveau continent de l'autre côté de l'Atlantique.
Mais je suis née ici.
La Provence m’a appris la mer les collines les pierres sèches les étés caniculaires les hivers secs et venteux, courir dans la garrigue à m’en arracher les genoux et respirer les odeurs des pins, les noms du Mistral et de la Tramontane.
Étudiante à Aix puis Marseille, comme deux sœurs fâchées, luxe et populaire, la montagne ou la mer comme emblèmes - personnalités complémentaires, j'ai découvert la pulsation particulière d'une ville qui dort à peine.
Et puis Paris, en touriste puis pour y (sur)vivre, inspirant la femme éros que je suis - garder la tête haute sous les regards sur mes jambes, marcher en talons sur les pavés, boire à en oublier les petites heures du matin - Paris pour y vivre comme si la mort était demain et ne pas vraiment savoir où est mon corps, Paris jusqu’à oublier le plaisir, me laisser enivrer de ses lumières, Paris pour me perdre, la ville qui ne dort jamais.
13 ans plus tard je marche à nouveau dans tes rues grises, les parfums familiers du métro de l’asphalte des épiciers, on trouverait ça étrange cette nostalgie des parfums des odeurs encire ancrées dans la bibliothèque de mes sens - les parfums de la France qui a connu une autre version de moi.
13 ans et tant de voyages ailleurs et intérieurs, je redécouvre une certaine essence qui me composait - libérée de sa peur, de sa honte, de sa dissociation. Du Marais au Quartier Latin, traverser à pieds la Seine sur un sourire, l'eau brille, pour un instant j'en oublierai la vastitude du fleuve Saint-Laurent et le show multicolore du Pont Jacques Cartier.
Paris
La densité des gens
Des rues
Du ciel
On te dit ville lumière
La lumière qui émane des réverbères
Des magasins
Des fenêtres la nuit
Pas la lumière du ciel
J’avais oublié ta lourdeur
Pourtant. Des milliers d’années d’Histoire
Avec un grand H
La ville qui ne dort jamais.
Paris vortex
Paris millénaire
Paris fascinante
Paris je te mémoire
Paris je ne t’ai pas oubliée.